- La quatre vingt quatorzième, p2
- La quatre vingt quinzième (...), p3
- la quatre vingt dix seizième, p4
- la quatre vingt dix septième, p5
- La quatre-vingt-huitième (...), p6
- La quatre vingt dix-neuvième, p7
- La centième nuit, p8
- La cent et troisième nuit, p9
- La cent et quatrième nuit, p10
- La cent et cinquième nuit, p11
- La cent et sixième nuit, p12
- La cent et septième nuit, p13
- La cent et huitième nuit, p14
- La cent et neuvième nuit, p15
- La cent dixième nuit, p16
- La cent onzième nuit, p17
- La cent douzième nuit, p18
- La cent treizième nuit, p19
- La cent quatorzième nuit, p20
- La cent cinquième nuit, p21
- La cent sixième nuit, p22
- La cent dix septième nuit, p23
- La cent dix huitième nuit, p24
- La cent dix neuvième nuit, p25
- La cent vingtième nuit, p26
- La cent vingt une nuit, p27
- La cent vingt deuxième nuit, p28
- La cent vingt troisième (...), p29
- La cent vingt quatrième (...), p30
- La cent vingt cinquième (...), p31
La cent dixième nuit
« SIRE, le petit Agib, piqué des plaisanteries de ses compagnons, sortit brusquement de l’école, et retourna au logis en pleurant. Il alla d’abord à l’appartement de sa mère Dame de beauté, laquelle, alarmée de le voir si affligé, lui en demanda le sujet avec empressement. Il ne put répondre que par des paroles entrecoupées de sanglots, tant il était pressé de sa douleur ; et ce ne fut qu’à plusieurs reprises qu’il put raconter la cause mortifiante de son affliction. Quand il eut achevé : « Au nom de Dieu, ma mère, ajouta-t-il, dites-moi, s’il vous plaît, qui est mon père ? » « Mon fils, répondit-elle , votre père est le visir Schemseddin Mohammed, qui vous embrasse tous les jours. » « Vous ne me dites pas la vérité, reprit-il, ce n’est pas mon père, c’est le vôtre. Mais moi, de quel père suis-je fils ? » À cette demande, Dame de beauté rappelant dans sa mémoire la nuit de ses noces, suivie d’un si long veuvage, commença à répandre des larmes, en regrettant amèrement la perte d’un époux aussi aimable que Bedreddin.
« Dans le temps que Dame de beauté pleurait d’un côté, et Agib de l’autre, le visir Schemseddin Mohammed entra, et voulut savoir la cause de leur affliction. Dame de beauté la lui apprit, et lui raconta la mortification qu’Agib avait reçue à l’école. Ce récit toucha vivement le visir, qui joignit ses pleurs à leurs larmes, et qui, jugeant par-là que tout le monde tenait des discours contre l’honneur de sa fille, en fut au désespoir. Frappé de celte cruelle pensée, il alla au palais du sultan ; et après s’être prosterné à ses pieds, il le supplia très-humblement de lui accorder la permission de faire un voyage dans les provinces du levant, et particulièrement à Balsora, pour aller chercher son neveu Bedreddin Hassan, disant qu’il ne pouvait souffrir qu’on pensât dans la ville qu’un génie eût couché avec sa fille Dame de beauté. Le sultan entra dans les peines du visir, approuva sa résolution, et lui permit de l’exécuter : il lui fit même expédier une patente par laquelle il priait, dans les termes les plus obligeants, les princes et les seigneurs des lieux où pourrait être Bedreddin, de consentir que le visir l’emmenât avec lui.
« Schemseddin Mohammed ne trouva pas de paroles assez fortes pour remercier dignement le sultan de la bonté qu’il avait pour lui. Il se contenta de se prosterner devant ce prince une seconde fois ; mais les larmes qui coulaient de ses yeux, marquèrent assez sa reconnaissance. Enfin, il prit congé du sultan, après lui avoir souhaité toutes sortes de prospérités. Lorsqu’il fut de retour au logis, il ne songea qu’à disposer toutes choses pour son départ. Les préparatifs en furent faits avec tant de diligence, qu’au bout de quatre jours, il partit, accompagné de sa fille Dame de beauté, et d’Agib, son petit-fils…
Scheherazade s’apercevant que le jour commençait à paraître, cessa de parler en cet endroit. Le sultan des Indes se leva fort satisfait du récit de la sultane, et résolut d’entendre la suite de cette histoire. Scheherazade contenta sa curiosité la nuit suivante, et reprit la parole dans ces termes :