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Histoire que raconta le marchand chrétien

 La cent trente cinquième nuit

« IL est plus à propos, madame, poursuivit-il, que vous ayez la bonté de m’enseigner votre demeure : j’aurai l’honneur de vous aller voir chez vous. La dame y consentit. « Il est, dit-elle, vendredi après demain ; venez ce jour-là, après la prière du midi. Je demeure dans la rue de la Dévotion. Vous n’avez qu’à demander la maison d’Abon Schamma, surnommé Bercour, autrefois chef des émirs ; vous me trouverez là. » À ces mots, nous nous séparâmes, et je passai le lendemain dans une grande impatience.
« Le vendredi, je me levai de bon matin, je pris le plus bel habit que j’eusse, avec une bourse où je mis cinquante pièces d’or ; et monté sur un âne que j’avais retenu dès le jour précédent, je partis accompagné de l’homme qui me l’avait loué. Quand nous fûmes arrivés dans la rue de la Dévotion, je dis au maître de l’âne de demander où était la maison que je cherchais ; on la lui enseigna, et il m’y mena. Je descendis à la porte, je le payai bien et le renvoyai, en lui recommandant de bien remarquer la maison où il me laissait, et de ne pas manquer de m’y venir prendre le lendemain matin, pour me remmener au khan de Mesrour.
« Je frappai à la porte, et aussitôt deux petites esclaves blanches comme la neige et très-proprement habillées, vinrent ouvrir. « Entrez, s’il vous plaît, me dirent-elles, notre maîtresse vous attend impatiemment. Il y a deux jours qu’elle ne cesse de parler de vous. » J’entrai dans la cour, et je vis un grand pavillon élevé sur sept marches, entouré d’une grille qui le séparait d’un jardin d’une beauté admirable. Outre les arbres qui ne servaient qu’à l’embellir et qu’à former de l’ombre, il y en avait une infinité d’autres chargés de toutes sortes de fruits. Je fus charmé du ramage d’un grand nombre d’oiseaux qui mêlaient leurs chants au murmure d’un jet d’eau d’une hauteur prodigieuse, qu’on voyait au milieu d’un parterre émaillé de fleurs. D’ailleurs, ce jet d’eau était très-agréable à voir : quatre dragons dorés paraissaient aux angles du bassin qui était en quarré, et ces dragons jetaient de l’eau en abondance, mais de l’eau plus claire que le cristal de roche. Ce lieu plein de délices, me donna une haute idée de la conquête que j’avais faite. Les deux petites esclaves me firent entrer dans un salon magnifiquement meublé ; et pendant que l’une courut avertir sa maîtresse de mon arrivée, l’autre demeura avec moi, et me fit remarquer toutes les beautés du salon…
En achevant ces derniers mots, Scheherazade cessa de parler, à cause qu’elle vit paraître le jour. Schahriar se leva fort curieux d’apprendre ce que ferait le jeune homme de Bagdad dans le salon de la dame du Caire. La sultane contenta le lendemain la curiosité de ce prince, en reprenant ainsi cette histoire :

Le conte suivant : Histoire racontée par le pourvoyeur du sultan de Casgar